Les petites notes

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La filiation légitime

La filiation légitime : La présomption pater is est[1] :

-      L’enfant conçu dans le mariage a pour père le mari de sa mère[2]

-      L’enfant né dans le mariage a pour père le mari de sa mère[3]

-      L’enfant dont une partie de la gestation a lieu dans le mariage à pour père le mari de sa mère au moment dudit mariage.

  • Cette présomption est à la fois un droit et une obligation pour le mari :

-      Un droit : le mari ne peut se voir priver de sa paternité par des personnes tierces au moyen d'une action en reconnaissance d'enfant : CS arrêt n°26/L du 02/02/1978. par François Anoukaha, Elomo-Ntonga Lisette et Ombiono Siméon. In "Tendances jurisprudentielles du droit des personnes et de la famille de l'ex-Cameroun oriental" p.98

-      Une obligation : le mari ne peut pas désavouer comme bon lui semble. L’action en désaveu n’est ouverte et ne peut prospérer que dans certains cas limitativement définis par la loi. Par exemple, l’article 313 cc dispose que « Le mari ne pourra, en alléguant son impuissance naturelle, désavouer l'enfant : il ne pourra le désavouer même pour cause d'adultère, à moins que la naissance ne lui ait été cachée, auquel cas il sera admis à proposer tous les faits propres à justifier qu'il n'en est pas le père ».

  • Le mariage à lui seul ne justifie pas toujours l’application de cette présomption. Il y a en effet des cas où, bien que conçu et/ou né dans le mariage, le code civil dispose qu’un enfant n’est pas couvert par la présomption pater is est. En ce sens, l’alinéa 2 de l’article 313 dispose qu’en cas de jugement ou même de demande soit de divorce, soit de séparation de corps, le mari peut désavouer l'enfant né trois cents jours après l'ordonnance prévue aux articles 236[4] du présent Code et 878 du Code de procédure civile, et moins de cent quatre-vingts jours depuis le rejet définitif de la demande ou depuis la réconciliation. « La présomption de paternité établie par l'article précédent ne s'applique pas à cet enfant », même en l'absence de désaveu, s'il a été légitimé par un nouveau mariage de sa mère, conformément aux dispositions de l'article 331, et son acte de naissance peut être rectifié sur ce point, s'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 99 du présent Code et de l'article 855 du Code de Procédure Civile. Concrètement donc, l’enfant conçu pendant la période où les époux étaient dispensés, par décision de justice, à résider séparément, ou pendant la période d’absence (au sens juridique du terme), ne peut bénéficier de la présomption pater is est.
  • Nature de la présomption : par définition, une présomption est une conséquence que la loi ou le juge tire d’un fait connu à un fait inconnu dont l’existence est rendue vraisemblable par le premier. Aussi, il s’agit d’un procédé technique qui dispense celui qui en bénéficie, la dispense de prouver le fait inconnu. Dans ce contexte, le bénéficiaire de la présomption se borne juste à prouver le fait connu, preuve de laquelle, le juge conclut en l’existence du fait inconnu. On classe généralement les présomptions en deux catégories :

-      Les présomptions simples ou réfragables qui peuvent être renversées par la preuve contraire

-      Les présomptions irréfragables qui ne peuvent être renversées par la preuve contraire (une sorte de présomption de vérité absolue).

Il est cependant difficile de ranger la présomption pater is est dans l’une de ces deux catégories. En effet, elle n’est pas véritablement une présomption irréfragable dans la mesure où l’action en désaveu peu permettre de la paralyser ; par ailleurs, elle n’est pas véritablement une présomption simple dans la mesure où un tiers ne peut contester la paternité du mari lorsque la loi le présume. Seul le mari a le monopole du désaveu. D’après la jurisprudence, La présomption ainsi établie ne peut être combattue que par l'action en désaveu exercée par le mari  dans des conditions fixées par la loi. (C.S.C.O. Arrêt n° 69 du 29 Juin 1965 Bull n° 12 p. 1061).

En organisant tous ces éléments on peut avoir :

 

I-    LE DOMAINE DE LA PRÉSOMPTION PATER IS EST

A- Le champ d’application de la présomption pater is est

1-   Les enfants conçus dans le mariage

2-   Les enfants conçus avant mais nés dans le mariage (Cass. Civ., 8 janvier 1930 aff. Degas Dalloz périodique 1930 I p. 51)

3-   Les enfants dont une partie de la gestation a eu lieu dans le mariage (Cass. Civ. 02 juillet 1936, aff. DEWALLE, Dalloz périodique 1936).

B-  Les restrictions

Il s’agit ici d’étudier les cas dans lesquels, la loi dispose que la présomption ne s’appliquera pas, bien que les enfants concernés soient nés dans le mariage. Il en est particulièrement ainsi :

1-   Des enfants conçus pendant la période de séparation légale des époux

2-   Des enfants conçus pendant l’absence du mari

 

II- LA FORCE DE LA PRÉSOMPTION PATER IS EST

Il s’agit ici de voir si cette présomption est absolue ou relative. En d’autres termes, peut-elle être remise en cause et dans quels cas ou, à quelles conditions. Justement, par le désaveu dont le monopole de l’action est réservé au mari, cette présomption peut être paralysée.

A- L’action en désaveu

1-   Les cas de désaveu

  • Le désaveu par preuve contraire : Art. 313 al. 1. « Le mari ne pourra, en alléguant son impuissance naturelle, désavouer l'enfant : il ne pourra le désavouer même pour cause d'adul­tère, à moins que la naissance ne lui ait été cachée, auquel cas il sera admis à proposer tous les faits propres à justifier qu'il n'en est pas le père ».

Cette action doit être fondée sur une cause déterminée, car d’après le code civil, la preuve de non-paternité ne peut résulter précisément que de l’établissement de l’impossibilité physique de cohabitation dû soit à l’éloignement du mari soit à son impuissance accidentelle pendant la période légale de conception de l’enfant.

Cependant, dans certains cas, la preuve est libre et on parle de désaveu pour cause indéterminée. Il en est ainsi lorsque la naissance a été cachée au mari (ce qui fait présumer l’adultère de la mère). On parle dans ce cas de recel de grossesse auquel on assimile le recel de naissance.

  • Le désaveu par simple dénégation : Ici, le mari n’a pas à prouver le bien-fondé de sa prétention et peut se contenter de décliner sa paternité présumé. Il concerne d’une part les enfants conçus pendant une période de dispense du devoir de cohabitation entre époux, d’autre part les enfants conçus avant le mariage. Dans ce dernier cas, il faut que les conditions posées par l’article 314 ne soient pas remplies. En effet, ce texte dispose que l’action en désaveu du mari ne peut aboutir « 1° s'il a eu connaissance de la grossesse avant le mariage ; 2° s'il a assisté à l'acte de naissance, et si cet acte est signé de lui ou contient sa déclaration qu'il ne sait signer ; 3° si l'enfant n'est pas déclaré viable ».

2-   Le régime de l’action en désaveu

Juridiction compétente : TPD ou TGI

Titulaire de l’action : le mari et exceptionnellement ses héritiers[5] (art. 317 cc)

Délais : un ou deux ou 6 mois selon les cas[6]

B-  Les effets du désaveu de paternité

  • Effacement rétroactif de tout lien de filiation entre le mari de la mère et l’enfant d’icelle
  • Nature adultérin de l’enfant sauf cas où il a été conçu avant le mariage
  • Possibilité de reconnaissance de l’enfant par un tiers.

 

TCHABO SONTANG Hervé Martial,

Assistant, FSJP-UDs



[1] La maxime latine « Pater is est quen  nuptiae demonstant «  signifie en français « le père est celui que les noces démontrent ».

[2] Cf. Art. 312 cc : « L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari ». Voir aussi art. 315 qui dispose que « Art.315 CC: « La légitimité de l'enfant né trois cents jours après la dissolution du  mariage pourra être contestée » ce qui suppose qu’à défaut de cette contestation, la présomption s’applique.

[3] Cf. art. 314 cc, « L'enfant né avant le cent quatre vingtième jour du mariage ne pourra être désavoué par, le mari dans les cas suivants : 1°s'il a eu connaissance de la grossesse avant le mariage ; 2° s'il a assisté à l'acte de naissance, et si cet acte est signé de lui ou contient sa déclaration qu'il ne sait signer ; 3°si l'enfant n'est pas déclaré viable »

[4] Il s’agit ici de l’ordonnance autorisant les époux à résider séparément. Ce texte dispose clairement que « Le juge peut, par l'ordonnance permettant de citer, autoriser l'époux demandeur à résider séparément ».

[5] Art. 317 : « Si le mari est mort avant d'avoir fait sa réclamation, mais étant encore dans le délai utile pour la faire, les héritiers auront deux mois pour contester la légitimité de l'enfant, à compter de l'époque où cet enfant se serait mis en possession des biens du mari, ou de l'époque où les héritiers seraient troublés par l'enfant dans cette possession ».

[6] Art. 316. — « Dans les divers cas où le mari est autorisé k réclamer, il devra le faire, dans le mois, s'il se trouve sur les lieux de naissance de l’enfant ;

Dans les deux mois après son retour, si, à la même époque, il est absent ;

Dans les deux mois après la découverte de la fraude, si on lui avait caché la naissance de l'enfant ».



05/07/2020
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